Publié le 24 octobre 2023 Mis à jour le 14 décembre 2023

Récompensées pour l'excellence scientifique de leur projet de recherche, les 35 jeunes talents de cette édition 2023 sont doctorantes et post-doctorantes et se verront attribuer une bourse d'un montant de 15 000 à 20 000 euros. Trois d'entre elles travaillent au sein d'un laboratoire de l'université Toulouse III - Paul Sabatier.

Alors que les grandes transformations environnementales et sociétales de notre temps réclament d’urgentes réponses, la sous-représentation des femmes dans les filières et métiers scientifiques reste toujours aussi criante.

De fait, le parcours des femmes dans ces carrières demeure encore jalonné d’obstacles, dont certains, présents dès l’enfance du fait des multiples constructions sociales et stéréotypes. Combien de jeunes filles se sentent encore illégitimes ou manquent de confiance en elles pour oser se lancer dans ces filières ? Créer, dès le plus jeune âge, les conditions qui leur permettront d’exprimer leur plein potentiel et de s’engager dans les sciences devient donc une nécessité pressante, qui passe notamment par la valorisation de role models au féminin.

Dans cet objectif, la Fondation L’Oréal, en partenariat avec l’Académie des sciences et la Commission nationale française pour l’UNESCO, décerne cette année encore le Prix Jeunes Talents Pour les Femmes et la Science France 2023 à 35 jeunes chercheuses.

Provenant de France métropolitaine et des régions d’Outre-mer, et issues de domaines de recherche très divers, ces chercheuses souhaitent partager et transmettre leur passion pour la science, afin d’inspirer les scientifiques de demain.
 
Mingmin Zhang, post-doctorante UT3 à l'Institut de mathématiques de Toulouse (IMT)​​​​

Originaire de Zibo, au Nord de la Chine, Mingmin Zhang a toujours été encouragée par son entourage dans la poursuite d’études scientifiques. Après un programme intégré master-doctorat à l’Université des sciences et technologies de Chine (USTC), puis une thèse en cotutelle avec l’Université d’Aix-Marseille, elle s’est orientée vers un post-doctorat à l’Institut de mathématiques de Toulouse. Ses travaux de recherche portent actuellement sur la théorie mathématique des phénomènes de propagation et d’asymptotiques précises dans des modèles de réaction-diffusion.
 

Quels sont les enjeux à court et à long termes de vos recherches et leurs applications ?

Mes travaux devraient nous permettre d’apporter des solutions à plusieurs défis de la recherche exploratoire. Prenons l’exemple des épidémies : les outils utilisés actuellement pour comprendre leur propagation ne prennent pas suffisamment en compte les comportements à long terme. Afin d’y remédier, je travaille sur des méthodes plus avancées.


Pourquoi avez-vous choisi une carrière scientifique ?

Ce qui me motive dans la recherche scientifique, c’est d’en apprendre chaque jour un peu plus et de développer de nouveaux concepts. De plus, les professeures rencontrées durant mes études ont eu une influence cruciale sur mon parcours et la poursuite de mes objectifs. Grâce à leurs encouragements, j’ai également gagné confiance en moi ainsi qu’en mon travail.


Dans votre parcours, avez-vous rencontré des difficultés en tant que femme ?

Oui, lorsque je recherchais un directeur de thèse à l’USTC. J’ai alors été confrontée au refus d’un professeur qui n’acceptait pas de superviser les doctorantes. Mais, à la suite de cet événement, j’ai eu la chance de rencontrer un autre professeur, qui a accepté. Il m’a permis de rencontrer d’autres mentors et m’a encouragée à poursuivre mes recherches en France.

Crédit : Fondation L'Oréal

Carine Estelle Koné, doctorante UT3 à la Station d'écologie théorique et expérimentale (SETE)

C’est parce qu’elle voulait allier ses convictions écologiques et sa carrière que Doufoungognon Carine Estelle Koné a décidé de venir en France pour étudier la biologie et l’écotoxicologie. Son engagement a été renforcé par un service civique dans le domaine de l’Éducation populaire sur les thématiques environnementales pour lequel elle a été lauréate de l’institut de l’Engagement en 2019 à Paris. Depuis trois ans, elle mène une thèse qui allie écotoxicologie, écologie et biologie cellulaire à la Station d’écologie théorique et expérimentale à Moulis, où elle étudie les effets du réchauffement climatique et de la pollution environnementale.

 

Crédit : Fondation L'Oréal
Quels sont les enjeux à court et à long termes de vos recherches et leurs applications ?
J’étudie les effets de la pollution et du réchauffement climatique sur un micro-organisme qui joue un rôle crucial dans la stabilité des écosystèmes d’eau douce : leur disparition pourrait être dramatique pour l’ensemble des communautés, y compris les vertébrés. Dans quelques années, mes résultats pourraient participer à l’amélioration des indicateurs utilisés pour évaluer les risques environnementaux dans ces milieux.

Pourquoi avez-vous choisi une carrière scientifique ?
J’ai eu deux modèles : mon père, qui s’est battu pour l’éducation scolaire de ses filles et qui souhaitait briser les préjugés disant que la femme n’est pas destinée à faire de longues études, et Odile Nacoulma, professeure en biochimie des substances naturelles, et ses découvertes sur les phyto-médicaments. Mon choix d’étudier les sciences environnementales découle de mon amour pour la nature et de la conscience qu’il est important de la protéger.

Que peuvent apporter les femmes dans la science ?
Homme et femme, nous sommes tous concernés par les questions environnementales. Il est donc légitime que nous participions de manière équitable à la recherche de solutions pour un monde meilleur. Les femmes ont beaucoup à apporter par leur génie. Ce n’est pas étonnant que l’excellence soit un mot féminin !

Aurora Pignata, post-doctorante Inserm à l'Institut toulousain des maladies infectieuses et inflammatoires (Infinity)

Après des études littéraires en Italie, Aurora Pignata découvre presque par hasard la recherche scientifique et décide d’étudier la biologie. Fascinée par l’infiniment petit ainsi que par la perfection et la complexité de la biologie cellulaire, elle mène ensuite une thèse à Lyon sur la création des circuits de neurones pendant le développement des embryons. Désormais, elle effectue son post-doctorat à l’Institut Toulousain des Maladies Infectieuses et Inflammatoires où elle étudie les maladies affectant le cerveau et la moelle épinière, comme la sclérose en plaques.

 

Quels sont les enjeux à court et à long termes de vos recherches et leurs applications ?
J’étudie le rôle que joue un certain type de globules blancs - appelés Lymphocytes T résidents - sur l’inflammation chronique de la sclérose en plaques. À court terme, il est nécessaire de mieux caractériser ces lymphocytes T résidents, pour identifier leur localisation et leur rôle dans la maladie. Mes recherches pourraient ouvrir la porte au développement de nouveaux traitements contre la maladie qui cibleraient spécifiquement les lymphocytes T résidents tout en préservant d’autres types cellulaires qui pourraient, au contraire, jouer un rôle bénéfique dans la pathologie.

Pourquoi avez-vous choisi une carrière scientifique ?
Le fait d’assister à des conférences grand public et a des événements scientifiques, comme la Nuit des Chercheurs, a éveillé ma curiosité et m’a donné l’envie d’entreprendre un cursus universitaire dans le domaine de la biologie. Par la suite, pendant ma formation, la rencontre de chercheuses extraordinaires, leur mentorat et leur soutien ont surement été des événements essentiels qui ont fait que je poursuive cette carrière.

Dans votre parcours, avez-vous rencontré des difficultés en tant que femme ?
J’ai grandi dans un milieu patriarcal dans lequel on m’a poussée à croire que les filles ne pouvaient pas se lancer dans des études scientifiques. Il a fallu que je rencontre des femmes inspirantes, au lycée puis pendant mes premières années d’études en biologie, pour trouver le courage de poursuivre dans cette voie.
Crédit : Fondation L'Oréal

[+] Consulter le site de For women in science