Publié le 1 octobre 2021 Mis à jour le 1 octobre 2021
Afin d’établir de façon rigoureuse un diagnostic de la contamination des sols et sédiments dans un territoire, il est tout d’abord nécessaire d’en définir le bruit de fond géochimique qui servira de référence locale. C’est ce qu’on fait des scientifiques du laboratoire Géosciences Environnement Toulouse (GET/OMP - CNRS/IRD/CNES/UT3 Paul Sabatier) et du Laboratoire de Chimie Agro-industrielle (LCA - Toulouse INP/INRAE) dans la vallée de l’Orbiel (Aude) où se trouvait les mines de Salsigne. Leurs travaux parus dans Chemosphere, montrent que l’activité minière a entraîné une forte contamination de plusieurs éléments dont l’arsenic.

La pollution est aujourd’hui la première cause de mortalité dans le monde avec près de 9 millions de décès chaque année (Landrigan et al., 2018, The Lancet). Il est donc fondamental de travailler sur la dispersion des métaux et métalloïdes au sein de nos milieux de vie. Parmi les sources de pollution, l’activité minière occupe une place de choix en laissant des marques visibles dans le paysage mais aussi invisibles avec la contamination des sols, des eaux et des sédiments. C’est le cas de la vallée de l’Orbiel (Aude, France) où se trouvait à une certaine époque la principale mine d’or d’Europe et d’arsenic au monde. Aujourd’hui, aucune publication scientifique n’aborde la dispersion des contaminants en vallée de l’Orbiel alors que de vives tensions existent entre une partie de la population et les autorités publiques, tensions exacerbées par les épisodes cévenols, se traduisant par des crues extrêmes et parfois dramatiques comme celle du 14 octobre 2018. Avant toute étude environnementale, il est primordial d’établir un état des lieux à travers un diagnostic de la contamination, et avant cela il est nécessaire de définir le bruit de fond géochimique local. Ce bruit de fond géochimique est la concentration en éléments qu'il devrait y avoir dans les sols, les sédiments, les eaux… si aucune activité polluante n’avait été présente sur le site. Les concentrations élémentaires ne seraient le résultat que des processus naturels d’érosion et d’altération des roches et des sols.

Une équipe de recherche a étudié ce bruit de fond géochimique local qui servira de référence pour évaluer l’impact de l’activité minière passée sur les sols et sédiments de la vallée de l’Orbiel. Il ressort de leurs travaux que l’activité minière a entrainé une forte contamination en arsenic mais aussi en d’autres éléments (cuivre, antimoine et plomb) des sédiments de la vallée de l’Orbiel à l’aval de l’ancien district minier. Au niveau du site Gue de Lassac, en sortie de l’ancien district minier, les teneurs en arsenic, plomb, antimoine et cuivre dans les sédiments de berge de l’Orbiel sont respectivement 74, 15, 11 et 6 fois les valeurs du bruit de fond géochimique. Elles peuvent cependant être beaucoup plus fortes, jusqu’à 1000 fois le bruit de fond géochimique pour la teneur en arsenic dans les sédiments du Grésillou, un affluent de l’Orbiel. Cette publication permet également de donner un éclairage sur le transfert de contaminants lié à la crue extrême d’octobre 2018. En effet, des sédiments transportés par cette crue ont pu être analysés et ont révélé des teneurs en arsenic très importantes (proches de 900 µg.g-1 pour un bruit de fond géochimique local de 44 +/- 12 µg.g-1).

 


Augmentation des concentrations en arsenic dans la zone (encadrement grisé) où se trouvaient les principaux sites d'extraction et de traitement de minerais du district minier de Salsigne.


La rivière de l'Orbiel © Philippe Behra


Référence
Delplace G., Viers J., Schreck E., Oliva P., Behra P. 2022. Pedo-geochemical background and sediment contamination of metal(loid)s in the old mining-district of Salsigne (Orbiel Valley, France). Chemosphere, 287(2) 132111
https://doi.org/10.1016/j.chemosphere.2021.132111

Contacts
Jérôme Viers - enseignant-chercheur UT3 au GET/OMP
Eva Schreck - enseignante-chercheuse UT3 au GET/OMP