Publié le 24 septembre 2021 Mis à jour le 24 septembre 2021
Contrairement à ce que l'on peut imaginer, les reptiles qui affectionnent la chaleur, sont très mal armés pour affronter des changements brutaux de température. Alors que les lézards et les serpents paient déjà un lourd tribut au réchauffement climatique, une espèce commune de gecko, la Tarente de Maurétanie, semble être en pleine expansion1. Afin de comprendre si le changement climatique et l’urbanisation ont favorisé l’expansion de cette espèce en dehors de son aire de répartition, une équipe toulousaine de scientifiques du laboratoire Évolution et diversité biologique (EDB – CNRS, IRD, Université Toulouse III – Paul Sabatier) en collaboration avec la Société herpétologique de France (SHF), a lancé un projet national de « science citoyenne » inédit : GeckoLocalisation. Participez à la recherche et aidez les scientifiques à cartographier la présence des geckos partout en France.


Une espèce sentinelle ?

La Tarente de Maurétanie ou Tarente du Midi (Tarentola mauritanica) est une espèce de gecko très répandue dans le sud de la France que l’on peut facilement observer sur les murs des maisons, et chassant les insectes attirés par des sources de lumière lors des chaudes soirées d'été. Dans leur milieu naturel, on trouve les tarentes principalement sur les rochers, toujours à la recherche d'une température optimale. En France, depuis quelques années, l'espèce devient même commune dans les régions en dehors du bassin méditerranéen. De plus, habituée aux milieux anthropisés, la Tarente de Maurétanie a notamment été observée à Toulouse, Bordeaux ou encore Lyon. Cependant, elle reste encore peu étudiée, et les scientifiques ignorent toujours les causes de cette expansion rapide et récente. Le changement climatique et l’urbanisation, ou une combinaison de ces deux facteurs, pourraient en être la cause. En effet, les températures du continent européen ont augmenté de 1.7 à 1.9°C2 au cours des dernières décennies, de concert avec l’expansion des villes. La chaleur dégagée par les matériaux urbains et les activités humaines rendent plus importants les phénomènes d’îlots de chaleur, notamment la nuit, lorsque les geckos sont plus actifs.


Participez au suivi de la biodiversité

Afin de comprendre si le changement climatique et l’urbanisation ont favorisé l’expansion de cette espèce de geckos, des scientifiques du laboratoire Évolution et diversité biologique de Toulouse (EDB) en collaboration avec la Société herpétologique de France (SHF), ont donc décidé de s’intéresser à la distribution de l’espèce en France et aux raisons pour lesquelles la tarente est devenue si commune en dehors de la région méditerranéenne en lançant le projet GeckoLocalisation. Pour les aider et devenir acteur ou actrice du suivi de la biodiversité, la première étape de la démarche consiste à répondre à un questionnaire en ligne en indiquant la présence ou non de geckos dans votre environnement. Avec ces données, les scientifiques feront des modèles de distribution d'espèces mettant en lien la présence des geckos avec les conditions environnementales prédominantes à l’échelle nationale. Ces modèles permettront de connaitre les variables environnementales (température, précipitation, taux d’urbanisation…) les plus importantes pour les geckos et de prévoir comment ils se répartiront dans les décennies à venir à mesure que l'environnement change.

En fonction de l’analyse des réponses et du taux de participation, de nouvelles actions participatives pourront être mises en place en impliquant plus activement les personnes intéressées dans le suivi des populations de geckos en différents endroits de France.

Répondre au questionnaire
Site web du projet


Le gecko, une source d’inspiration…

Les geckos peuvent changer de couleur rapidement, du brun clair au gris foncé presque noir en moins d'une heure pour se camoufler et éviter ainsi la prédation. Ils ont un pigment cutané similaire à celui de l’humain : les mélanines. Mais contrairement à nous, les geckos ont la capacité de déplacer ces pigments à l'intérieur des cellules de la peau. Curieusement, les geckos changent de couleur en percevant la couleur de l'arrière-plan qui les entoure et non à travers leurs yeux. Leur peau contient un type de protéine ; les opsines, similaires à celles exprimées dans nos yeux et qui semblent être responsables du déclenchement des changements de leur couleur. On peut dire que les geckos voient avec leur peau !
De plus, les geckos possèdent sur la face inférieure de leurs pattes des lamelles adhésives, garnies de millions de poils microscopiques. Chaque poil est attiré perpendiculairement à la surface par des forces électrostatiques (forces de Van der Waals) qui agissent à l'échelle nanométrique et lui permettent de se déplacer au plafond de nos habitations ou encore sur l’eau.

Bibliographie
Seeing through the skin: dermal light sensitivity provides cryptism in moorish gecko - Fulgione et al. 2014, Journal of Zoology, 294:122-128
DOI : https://doi.org/10.1111/jzo.12159
Physiological colour change in the Moorish gecko, Tarentola mauritanica (Squamata: Gekkonidae): effects of background, light, and temperature - Vroonen et al. 2012, Biological Journal of the Linnean Society 107: 182-191.
DOI: https://doi.org/10.1111/j.1095-8312.2012.01915.x

Notes
1. La liste rouge des espèces menacées en France – reptiles de France métropolitaine - 2015
2. https://www.eea.europa.eu/data-and-maps/indicators/global-and-european-temperature-10/assessment

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