Publié le 15 mai 2023 Mis à jour le 14 décembre 2023
La découverte, en Afrique du Sud, de fossiles de quatre enfants morts il y a environ deux millions d’années permet de reconstituer la croissance du plus proche parent, aujourd’hui disparu, du genre humain : le paranthrope. Leur étude menée par José Braga, professeur de paléoanthropologie à l’université Toulouse III – Paul Sabatier et au Centre d’anthropobiologie et de génomique de Toulouse (CAGT – CNRS/UT3), et son équipe marque un tournant dans nos connaissances sur les premiers humains. Ces résultats ont été publiés dans Science Advances.

Avant d’atteindre leur troisième année, quatre enfants sont morts il y a environ deux millions d’années, sur le territoire de l’Afrique du Sud. Leurs ossements fossiles ont été exhumés dans deux anciennes grottes, dans les localités de Kromdraai et Drimolen, dans les environs de Johannesburg et de Prétoria. Pour la toute première fois, ils permettent de reconstituer la croissance du plus proche parent, aujourd’hui disparu, du genre humain : le paranthrope. Exhumés par une équipe internationale dirigée par José Braga, ces nouveaux fossiles ont été analysés avec des techniques innovantes d’imagerie (micro-tomographie à rayons X) de morphométrie 3D.

Jusqu’à présent, seuls des crânes d’enfants australopithèques permettaient d’étudier la croissance chez des espèces plus ou moins apparentées au genre humain (Homo). Le plus célèbre, l'enfant de Taung, fut mis au jour en 1924 par le professeur Raymond Dart, en Afrique du Sud. Son espèce - Australopithecus africanus - était très éloignée du genre humain et l’a précédée dans le temps. Dans le cas des enfants fossiles de Kromdraai et Drimolen, leurs caractéristiques sont bien plus humaines que celles des australopithèques, bien que n’appartenant pas au genre Homo, en tant que paranthropes.
 

Leur espèce – Paranthropus robustus - vivait aux côtés des premiers humains. Comparés, les enfants humains et paranthropes nous apprennent beaucoup sur l’étroite parenté de ces deux groupes et sur leurs différences les plus essentielles. Les enfants de paranthropes grandissaient bien plus rapidement que ceux humains. Leur cerveau atteignait une taille adulte dès 3 ans et bien d’autres caractéristiques liées à leur mastication végétarienne étaient également en place très tôt au cours de l’enfance. « L’enfance des paranthropes devait être étonnamment rapide, bien plus que pour de nombreuses espèces actuelles de grands singes, chimpanzés et gorilles », s’émerveille José Braga.

Les découvertes de Kromdraai et de Drimolen nous révèlent également l’identité du célèbre crâne d’un enfant fossile, découvert il y a 50 ans à Swartkrans, en Afrique du Sud. Un fossile iconique car il porte des marques de crocs. Contrairement à l’identification initiale, ce petit crâne est celui d’un enfant humain, emporté par un léopard qui l’avait pris pour proie. Cette nouvelle lumière projetée sur ce fossile nous apprend que les jeunes humains étaient, eux aussi, comme les enfants paranthropes, chassés par de redoutables prédateurs.

De retour de mission d’Afrique du Sud, José Braga et son équipe ont effectué une campagne de plusieurs semaines avec de nouvelles découvertes.
 

« Elles nous permettront bientôt d’affiner nos théories et d’identifier les principales différences dans les modes de vie des premiers humains et des paranthropes. Car la question de la disparition de ces derniers demeure encore très énigmatique », conclut le paléoanthropologue.

 
Référence
Hominin fossils from Kromdraai and Drimolen inform Paranthropus robustus craniofacial ontogeny
José Braga, Bernard A. Wood, Veronika A. Zimmer, Benjamin Moreno, Catherine Miller, John F. Tachkeray, Bernhard Zipfel, Frederick E. Grine
Science Advances, 2023

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