Publié le 13 mai 2020 Mis à jour le 15 mai 2020

La crise sanitaire provoquée par la pandémie Covid-19 a entraîné un profond bouleversement des rites funéraires.

Dans un article intitulé “Pandemic-related excess mortality (COVID-19), public health measures and funerary rituals”, publié le 5 mai 2020 sur EClinicalMedicine, les Professeurs Éric Crubezy, anthropologue à l’université Toulouse III – Paul Sabatier - laboratoire Anthropologie moléculaire et imagerie de synthèse (Amis), et Norbert Telmon, chef du service de médecine légale au CHU de Toulouse, analysent l’impact des mesures de santé publique sur le processus de deuil.

Ainsi, ils reviennent sur la législation en perpétuelle évolution depuis le début de la pandémie, rappelant qu’au départ, la toilette funéraire n’était plus autorisée et que l’inhumation ou la crémation devaient se dérouler dans les 24 heures suivant le décès. Ces mesures de santé publique ont privé de nombreuses familles d’un dernier au-revoir à la personne aimée et de moments cruciaux pour entamer leur deuil.

Or, Éric Crubezy et Norbert Telmon le rappellent : trois étapes sont essentielles dans le processus de deuil. Il est important de voir le corps du défunt afin d’intégrer que la personne est décédée. Il est ensuite nécessaire de cacher le corps (inhumation ou crémation) au cours d’une cérémonie collective permettant aux proches d’être soutenus par la communauté. C’est suite à ces deux étapes que la troisième peut être abordée : accepter la mort de la personne aimée.

Puis, la législation a évolué, levant notamment l’obligation d’une inhumation ou crémation rapide. Cette mesure a mené à une réinvention de la sépulture d’urgence, à travers la création de morgues temporaires (camions réfrigérés, patinoires) dans lesquelles les corps étaient exposés en attendant d’être traités, rappelant alors tristement les fosses communes médiévales.

Pour les deux auteurs, il est donc important de repenser les mesures de santé publique en cas de pandémie afin de permettre à chacun de pouvoir observer le rite funéraire qui lui est propre. Ils insistent sur l’importance de laisser les proches voir la personne défunte (en respectant les gestes barrières) et préconisent une inhumation ou crémation dans les trois jours, afin d’éviter la réapparition de fosses communes qui renforcent le traumatisme de la société et ajoutent de l’angoisse au malheur.