Publié le 19 septembre 2023 Mis à jour le 14 décembre 2023

Des recherches dirigées par Gonzague Agez et Vincent Paillard, enseignants-chercheurs à l’université Toulouse III – Paul Sabatier, au Centre d’élaboration de matériaux et d’études structurales (CEMES) du CNRS, ont démontré qu’il est possible de façonner l’émission de lumière dans des systèmes hybrides à base d’émetteurs de photons couplés à des nano-antennes de silicium, en utilisant des lasers dans des états de polarisation spécifiques.

Leur étude, menée en collaboration avec d’autres équipes scientifiques basées à Lyon, Dijon, Grenoble et Toulouse1 permet une meilleure compréhension de l’interaction lumière – matière et ouvre la voie à des applications dans le domaine de la nanophotonique. Elle est publiée dans Light: Science & Applications - Nature, le 19/09.

La nanophotonique (ou nano-optique) est l’étude de l’interaction de la lumière avec des objets de dimensions beaucoup plus faibles que la longueur d’onde, dont un des objectifs est de confiner la lumière à l’échelle nanométrique pour miniaturiser des composants optiques.

Cependant, fabriquer d’infimes sources de lumière à cette échelle est un processus complexe, car il faut positionner des émetteurs de photons à quelques nanomètres (dans la zone dite de champ proche optique) autour de nanostructures agissant comme des antennes. Leur rôle, similaire à celui d’une antenne radiofréquence, est de contrôler et diriger l’émission de lumière. 

Ce comportement est obtenu en jouant sur les résonances optiques de l’antenne quand elle est excitée par un faisceau laser de longueur d’onde judicieusement choisie. Ces résonances génèrent des exaltations locales (des « points chauds ») du champ proche optique, soit une plus forte émission de lumière provenant des émetteurs de photons placés à ces endroits. On peut donc façonner l’émission d’une source lumineuse à l'échelle nanométrique.

Gonzague Agez et Vincent Paillard du CEMES, en collaboration avec d’autres équipes scientifiques françaises, ont démontré qu’il est possible de modeler la carte du champ proche optique autour de la nanostructure, en utilisant un faisceau laser mis en forme de beignet (doughnut) et une polarisation très différente de la polarisation linéaire habituelle.

A gauche : un anneau de silicium qui balaye le spot laser fixe ; à droite : la construction du champ proche optique associé
Crédit : Vincent Paillard

Les chercheurs ont utilisé un film mince dopé avec des ions de terre rare (Eu3+) de quelques nanomètres d’épaisseur, déposé sur des anneaux de silicium de différentes dimensions, jouant le rôle de nano-antennes. La lumière émise par ce système, excité par un laser avec différentes polarisations (linéaire, radiale, azimutale), a été cartographiée pour établir une carte très précise de l’amplification lumineuse. Et elle correspond avec exactitude aux « points chauds » du champ proche optique obtenus par des simulations numériques.

Ces recherches sur les systèmes hybrides, combinant émetteurs de photons et nanostructures en silicium, ouvrent des perspectives intéressantes pour la production de sources de lumière à l'échelle nanométrique. De telles sources pourraient être intégrées sur des composants électroniques, comme les microprocesseurs, car leurs technologies de fabrication sont totalement compatibles avec celles déjà existantes.
 
 
Reference
Control of light emission of quantum emitters coupled to silicon nanoantenna using cylindrical vector beams
Martin Montagnac, Yoann Brulé, Aurélien Cuche, Jean-Marie Poumirol, Sébastien J. Weber, Jonas Müller, Guilhem Larrieu, Vincent Larrey, Franck Fournel, Olivier Boisron, Bruno Masenelli, Gérard Colas des Francs, Gonzague Agez and Vincent Paillard
Light : Science & Applications, 2023

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1 : Ont également contribué à cette étude : le Laboratoire interdisciplinaire Carnot de Bourgogne (ICB, CNRS/UBFC) ; le Laboratoire d'analyse et d'architecture des systèmes (LAAS-CNRS) ; le CEA-Leti et l’Université Grenoble Alpes ; l’Institut lumière matière (ILM, CNRS/Université Claude Bernard Lyon 1) ; l’Institut des nanotechnologies de Lyon (INL, CNRS/INSA Lyon/CPE Lyon/Ecole centrale de Lyon/Université Claude Bernard Lyon 1).