Publié le 12 septembre 2022 Mis à jour le 20 septembre 2022

En se basant sur des supercalculateurs parmi les plus puissants, une équipe du laboratoire Géosciences environnement Toulouse (GET - UT3/CNRS/IRD/CNES) développe un nouveau simulateur permettant de modéliser en détail les effets multiples de la fonte progressive du pergélisol.

Avec le réchauffement des températures dû au changement climatique, le pergélisol (ou permafrost, en anglais) commence son dégel et menace de relâcher d’immenses quantités de gaz à effet de serre dans l’atmosphère. La présence de permafrost modifie considérablement les flux d’eau, la stabilité des sols et les conditions environnementales de multiples manières, ce qui n’est pas sans conséquence pour les écosystèmes et les activités humaines dans les régions froides. Par exemple, le sol gelé est bien moins perméable et donc le pergélisol limite considérablement la percolation en profondeur des eaux infiltrés.

Ainsi, il est des zones de taïga où le cumul des pluies est de type désertique et où le mélèze, un arbre de la famille des pins, ne peut se développer que grâce à la présence du permafrost. Le modéliser devient donc nécessaire afin d’anticiper au mieux les impacts de son dégel. Néanmoins, ce type de modélisation est particulièrement difficile du fait des non-linéarités et des couplages caractérisant les processus physiques impliqués : les transferts d’eau et de chaleur en milieux poreux avec des périodes de gel et de dégel.

C’est là qu’entrent en jeu les supercalculateurs de dernière génération, pouvant utiliser des centaines de milliers de processeurs simultanément. C’est pour cela que le GET développe, en partenariat avec le Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement (LSCE, CEA/CNRS/UVSQ/IPSL), un simulateur de permafrost avec OpenFOAM, logiciel open source de référence en calcul intensif pour la mécanique des fluides numériques. Ce solveur cryohydrogéologique, intitulé permaFoam, a été publié dans Computer Physics Communications (Orgogozo et al.).

Le bassin versant de la Kulingdakan (adapté de Viers et al., 2015), en zone de permafrost continu, avec une visualisation du maillage utilisé pour sa modélisation avec permaFoam.


Ses performances en calcul massivement parallèle, c’est-à-dire en utilisant simultanément un grand nombre de processeurs, sont démontrées jusqu’à 16 000 cœurs, en utilisant les supercalculateurs de CALMIP (Olympe) et du GENCI (Occigen au CINES et IRENE-ROME au TGCC). Deux exemples d’applications en Sibérie centrale et en Sibérie orientale sont également présentés. Les résultats obtenus sur le premier site illustrent l’importance des interactions permafrost-végétation tandis que ceux obtenus sur le second décrivent les interactions permafrost-rivière.

Cet outil est actuellement utilisé pour quantifier la fonte du pergélisol à l’échelle centennale sur quatre sites de suivi environnementaux d’Eurasie Boréale dans le cadre du projet ANR HiPerBorea. La possibilité effective de tester plusieurs scénarios de changement climatique pour chacun des sites est confirmée par les premiers résultats obtenus (Xavier et al., communication à la CMWR 2022).

Référence :
Permafrost modelling with OpenFOAM®: new advancements of the permaFoam solver
L.Orgogozo, T.Xavier, H.Oulbani, C.Grenier

 

Géosciences environnement Toulouse (GET), unité mixte de recherche de l’Université Toulouse III - Paul Sabatier, du CNRS, de l’IRD et du CNES, est un laboratoire de recherche pluri- et interdisciplinaire en sciences de la terre et de l’environnement rattaché à l’Observatoire Midi-Pyrénées (OSU OMP).